Il fait beau et chaud, le soleil est resplendissant. Je roule à 120 km/h sur l’autoroute, je souris la vie est belle. Je connais cette route, ce paysage réconfortant et sécuritaire.  Tout à coup … un panneau indique une sortie, je tente de le lire mais mon cerveau ne collabore pas et il ne veut pas interpréter les mots… Pas grave, je continue mon chemin… OUPS ! Je ne peux plus continuer ma route, elle s’arrête ici, la sortie est obligatoire… Je prends la sortie contre mon gré.

Mon pouls s’accélère, j’ai des chaleurs; l’insécurité monte dans mon escalier intérieur. Les mots sont affichés à nouveau sur le panneau et je m’attends qu’on m’offre de tourner à gauche ou à droite mais non encore là un seul chemin possible, on tourne à droite ici, à gauche il n’y a rien pas de route, pas de paysage, rien… On dirait un énorme mur de béton pour être certain que je ne puisse pas choisir cette avenue. Oh là là, mes mains sont moites et je sens la peur dans mon ventre. Je n’ai pas prévu changer d’itinéraire aujourd’hui, ça mène où cette route là ? Et là instinctivement mon cerveau traite les mots que j’ai lu tout à l’heure ; SORTIE 12 A : Votre 1er enfant quitte le nid familial. OH SHIT! Ehhhh Non non pas tout de suite, elle a seulement 17 ans. Hier encore on jouait à la Barbie ensemble, on bricolait et on allait en rando. 

Je ne sais pas faire ça moi. Je viens à peine de passer mes classes de parents. Ça fait 17 ans que je suis en formation, que j’essaie, que j’analyse, que je travaille sur moi pour être une meilleure personne. J’ai encore tellement à apprendre. J’ai manqué mon coup quelques fois; à vrai dire plusieurs fois. J’ai encore besoin de pratique là là. Un nouveau rôle, bof ! non pas vraiment. J’arrête pas de m’adapter à toutes les foutus situations possibles. Là, je commence à être bonne et il faut que je me réoriente !?! Et je n’ai pas le choix en plus, c’est obligatoire…passage obligé ! Ah ben cibole. 

Ok là, j’ai besoin de m’arrêter sur le bord de la route et de réfléchir à tout ça. J’ai besoin de prendre du recul. J’aperçois une petite halte, je vais reprendre mon souffle ici et le contrôle de mes émotions. J’arrête mon auto, je prends 3 grandes inspirations/expirations et je plonge à l’intérieur de moi comme un scaphandrier mal habile.

Je l’ai espéré pendant quelques temps pour ensuite la porter pendant 9 mois. Je l’ai allaité pendant 11 mois… Elle sent le biscuit à la vanille. J’ai jamais aimé quelqu’un comme ça. On dirait que mon cœur va fendre tellement il est gonflé d’amour. On lui a appris à manger, à dormir (ça c’était plus compliqué ;-)), à marcher, à parler, à compter, à écrire, à bricoler, à faire des forts de neiges et des tunnels, à socialiser, à nager, à faire du vélo, à respecter , à persévérer, à croire à ses rêves , à aimer, à faire confiance, à être un bon humain. Je ne sais plus comment faire sans elle. On dirait un morceau qui s’est imbriqué dans mon corps. Je ne peux pas m’imaginer ma vie au quotidien sans elle. Ici maintenant, le sens de ma vie est sans dessus dessous. J’ai perdu le nord , ma boussole s’emballe … Mon enfant, mon projet de vie… Je vais faire quoi moi maintenant. Je ne me rappelle plus c’était comment avant elle. Je ne me rappelle plus comment m’occuper de moi et me prendre soin 😉

Tout à coup me vient l’idée de négocier avec la vie pour encore un peu de temps… ou tout simplement de négocier avec mon enfant ; « Chérie, peux-tu ne pas aller au Cégep à La Pocatière dans ce qui te passionne! » Tu pourrais peut-être trouver un beau programme d’études à Québec. C’est grand Québec et il y a plusieurs cégeps. ». Et là elle me dirait : T’es sérieuse là !!!. Tu me dis depuis toujours de réaliser mes rêves et ça maman c’est mon rêve… À l’intérieur de moi, un oui mais s’étouffe dans une tempête d’émotions mêlé de pluie qui roule sur mes joues. Merde, y’a un orage qui se prépare… Le même sorte d’orage que le soir de son bal de finissant du secondaire quand je suis revenue à la maison après le 5 à 7 avec les parents et que j’ai braillé toute la soirée. Ah finalement! il y avait eu des indications sur mon autoroute pour m’aviser que cette sortie s’en venait. J’avais seulement ignoré l’information. J’adore parfois faire l’autruche et me creuser un gros trou pour me mettre la tête mais le cœur lui y rentre jamais dans le trou c’est contre sa nature.

À l’abri de la tempête dans l’auto, je repense à tous ces beaux souvenirs… et aussi au moins beaux comme une adolescence difficile. Je pense à elle, une fille rebelle qui a besoin d’indépendance et qui rêve de voyager depuis longtemps. Je pense aux oiseaux qui un jour ou l’autre quitte le nid. Le cours normal de la vie. On n’arrête pas une rivière de couler

Et là, la fameuse citation que nos enfants ne nous appartiennent pas, que c’est la vie qui nous les prête…bla, bla, bla.  Je sais tout ça et ça fait beaucoup de sens. L’orage se calme tranquillement. Je sais qu’il y en aura d’autres mais pour là ; la pluie et le vent s’arrête et moi, je comprends que je dois m’adapter encore une fois et que finalement la vie est une succession d’événement auxquels on doit s’adapter.

Une musique de fête me parvient au loin, un sentiment d’apaisement, une étincelle de joie… Mon cœur me rappelle qu’il me reste un autre oiseau dans le nid. Wahou! Il a 15 ans cet oisillon. Encore quelques années avant la prochaine sortie. YOUPI!!!! J’imagine pas quand celui-là va partir. Pis j’aime mieux pas pensé à ça maintenant.

Ici , maintenant est une bonne formule . Ma fille a besoin de moi. On a un déménagement a planifié et des casseroles a acheté. 

Let’s go girl , you can do it ! ❤️